En 2019, l’AVB présentait son Plan Vélo en vu des municipales. L’idée était avant tout de montrer un cap, un niveau d’ambition décent, pour ce que devrait être une voirie cyclable. Fini les bandes de peinture qui servent moins à sécuriser les cyclistes qu’à les assigner au caniveau, désormais les aménagements privilégieraient les pistes cyclables. Celles-ci devraient faire 2,30m. À l’avenir, les voies seraient continues aux intersections, exit la piste qui se finit en eau de boudin au carrefour ! Nous avions fait des propositions réalistes et ambitieuses en ce sens.
En 2020, de nombreuses communes françaises montraient la faisabilité, et l’extraordinaire succès, des « coronapistes », aménagées en quelques semaines et dont la qualité dépassaient de beaucoup ce à quoi nous étions habitué.e.s.
Seulement voilà : « à Besançon les rues sont étroites » avait un jour asséné l’ancien maire Jean-Louis Fousseret, lors d’une réunion publique. Qui a déjà milité pour les mode doux s’est forcément déjà entendu opposer « on ne va tout de même pas faire des pistes cyclables partout ! ». Et bien nous sommes plutôt d’accord avec ça ! Pour les rues les plus étroites, l’enjeu majeur, c’est un trottoir décent !
Pourtant le vélo est un mode de transport en porte-à-porte qui doit permettre de se rendre partout, il n’est pas question de renoncer à la sécurité dans telle ou telle partie de la ville il faut donc « ouvrir le spectre des aménagements pour aller conquérir le réseau secondaire » comme nous y invite Sonia Lavadinho dans une récente tribune du Monde. Cela, nous en parlions déjà dans notre plan vélo, lorsque nous recommandions de hiérarchiser le plan de voirie : circonscrire le transit inter-quartiers à quelques grands axes et réserver les petites rues à un trafic de desserte locale avec des vitesses réduites. Nous n’avions cependant pas illustré ce concept avec une application concrète, nous allons corriger ce tort avec un cas caricatural : la rue Gabriel Plançon !
Partons du constat : Cette rue méconnaît les règles fondamentales en matière d’accessibilité piétonne. Un trottoir doit faire, a minima, 1,40m de large libre de tout obstacle. Rue Plançon, le trottoir fait, par endroits, à peine la largeur d’un pied (rappelons à certains aménageurs qui les utilisent rarement, qu’il en faut généralement deux pour marcher). Les piétons sont donc amenés à descendre sur la chaussée. Les personnes à mobilité réduite sont exclues. Pour les riverains, franchir le pas de sa porte implique de se retrouver au contact immédiat de véhicules lancés à pleine vitesse. Pour les cyclistes, cet axe important pour rejoindre la voie cyclable de la Malcombe implique un fort dénivelé, et donc une vitesse réduite qui pousse les automobilistes à dépasser sans précautions, malgré des conditions de visibilité qui devrait inciter à la prudence. Bref, pour les modes doux, c’est inhospitalier, voire impraticable. Cette rue, trop étroite pour les cyclistes et les piétons, semble en revanche suffisamment large pour y faire passer des autos, beaucoup d’autos! (Une variante de la passoire Schadock qui laisse passer les nouilles, mais pas l’eau)
En cas de réfection de voirie, la ville sera tenue légalement d’élargir considérablement ces trottoirs, véritables insultes faites aux piétons, mais également de créer un aménagement cyclable. Or on voit bien que dans ces conditions, le maintien du double sens de circulation pour les voitures est tout simplement impossible. Ce qui est possible, en revanche, c’est un partage de l’espace, permis par une réduction de la dangerosité des voitures, en limitant fortement leur nombre et leur vitesses. L’outil pour cela : Le plan de voirie !
Le pâté de maison est ceint par un ensemble de voies larges à 2 sens de circulation automobile. Aujourd’hui, une rue étroite comme Gabriel Plançon est mise sur le même plan qu’un axe majeur comme le boulevard Charles de Gaulle et sert de « raccourci » aux automobilistes. Particulièrement pratique, la rue n’a pas de feux et le feu clignotant jaune devant la City permet de tourner à droite en permanence. Voilà comment on envahi une petite rue résidentielle de véhicules en transit, faisant hurler leur moteurs pour monter la côte, souvent à beaucoup plus de 50km/h.
Ce que nous préconisons, c’est de déployer un sens unique dans le sens de la montée entre les rues Clerc de Landresse et de Chaudanne et un sens unique descendant entre les rue Clerc de Landresse et Pochet. Le double sens serait maintenu de la City jusqu’à l’entrée du Parking des grands immeubles du quai Bugnet. On maintiendrait l’accès de chaque rue pour les riverains et les services publics tout en faisant disparaître l’aubaine pour le « rat running » ou « trafic de transit ». Ce transit, trop souvent négligé dans les projets d’apaisement de quartier, explique en grande partie l’échec des zones 30 et de « zones de rencontre » ou la norme de vitesse est plus du côté de 50km/h que de 20. Un panneau, jamais n’abolira la violence!
Actuellement, il n’y a pas de ligne de bus qui passe par cette rue, mais cela pourrait constituer un itinéraire intéressant pour Ginko, de même que pour les véhicules d’intervention de la caserne située rue du général Brulard. Pour ces véhicules prioritaires, un feu pourrait permettre le passage de la rue en trafic alterné. En effet, la partie en sens unique ne serait que de 150m.
Côté vélo, il s’agirait de garantir le double-sens cyclable tout le long. Une autorisation des cycles sur le tourne à gauche – aujourd’hui réservé aux bus sur le boulevard Charle de Gaulle – serait également la bienvenue. En faisant de cette rue un axe de transit pour les cycles et de desserte pour les automobile, on assure un ratio vélos/voitures qui permet d’obtenir une sécurité subjective et de faire de cette rue un faisceau important dans un réseau cyclable complet.
Enfin, le plan de voirie étant l’occasion de repenser le quartier dans sa globalité, nous suggérons la pose d’une borne pour piétonniser le bas de la rue des Vieilles Pierrières. Dans cette rue, le trafic est déjà restreint par un dispositif de sens uniques alternés, mais là aussi l’étroitesse des trottoirs est désastreuse. La raison d’être de cette entrave à la marche est la volonté de maintenir du stationnement sur voirie, lequel détériore la visibilité et rend la rue inhospitalière. Et puis, il y a la question de l’école. Aujourd’hui la rue est conçue de sorte à freiner les enfants en leur posant des barrières croisillon. Demain nous aimerions voir une borne qui force les ayant droit à marquer l’arrêt avant de s’engager dans cette portion de rue. Il serait en effet plus humain d’imposer une contrainte aux comportements qui pose un danger, plutôt qu’à celle et ceux qui le subissent.
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