L’AVB voit d’un œil favorable la démarche du projet pôle Viotte : des services publics recentrés sur le cœur de ville, dans un quartier dense, à proximité de la gare et des transports publics. La démarche urbanistique nous séduit. De plus, la mairie de Besançon fait un choix audacieux et intelligent en limitant à 320 le nombre de places de parking pour ce projet, qui prévoit d’accueillir 1100 employé.e.s, des services de l’État et du conseil régional. Pour que ces choix d’aménagement soient un succès, il est important de s’appuyer sur tous les transports alternatifs à la voiture, dont… le vélo, bien sûr!
Et le vélo justement, est très pertinent pour se rendre au travail au Pôle Viotte. D’une part, il y a la nature des emplois qui vont y être créés : des emplois administratifs et de services tertiaires, qui n’imposent pas de transports de charges qui justifieraient l’usage d’une voiture. De plus quelques coups de pédales matin et soir sont à même de palier la sédentarité imposée par le travail de bureau. D’autre part, il y a la localisation du site : on est à distance cyclable d’à-peu-près tout! Selon notre analyse de ces données démographiques de 2000, 54% de la population de Besançon vit à 3km du nouvel écoquartier, soit ~12min à vélo. Mieux, 84% des bisontin.e.s vivent à 5km du pôle, soit ~20min à vélo, sans forcer. Enfin, la construction du secteur situé au nord de la gare (prévu dans une deuxième phase de travaux) comptera 237 places de stationnement vélo couvertes et sécurisés, ce qui permettra de laisser sereinement sa bicyclette au pied de l’immeuble et de la retrouver sèche à l’heure de rentrer chez soi.
Tout n’est pas rose cependant, le quartier de la gare Viotte – qui se veut « un haut lieu d’intermodalité » – a négligé la petite reine. Aujourd’hui, aucune infrastructure cyclable ne permet de rejoindre la gare, nous le déplorons. L’avenue du Maréchal Foch est dépourvue d’itinéraires vélo, malgré les récents travaux d’aménagement du tram et l’obligation légale de prévoir un accès cyclable lors de tels travaux. La voie cyclable de l’avenue de la Paix s’interrompt au niveau du Parc des Glacis. Côté Nord, la bande cyclable de la rue de Vesoul s’efface au niveau de la gare, et la rue Nicolas Bruand n’a d’aménagements ni pour les cyclistes, ni pour les piéton.ne.s! Par ailleurs, aucun franchissement cyclable de la voie ferrée n’existe au niveau de la gare.
Le projet du pôle Viotte devrait apporter quelques améliorations, avec des cheminements mixtes (piétons/cyclistes) traversants les secteurs Nord et Sud. Une réfection de la rue Nicolas Bruand, plus que bienvenue, devrait avoir lieu d’ici quelques années. Par ailleurs, il est prévu que la piste bidirectionnelle de la rue de la paix soit prolongée et que la bande cyclable de la rue de Vesoul soit mise en continuité.
La rénovation et l’élargissement de la rue de la Viotte aurait pu être une opportunité intéressante pour créer un accès cyclable à la gare. Cette rue aux trottoirs étroits et irréguliers, excluant les personnes à mobilité réduite, se devait d’être entièrement repensée et rénovée. Elle dispose actuellement d’un contre-sens cyclable protégé, mais celui-ci ne couvre qu’une portion de la rue, ce qui le rend inutilisable. Avec un élargissement de la rue de 4,9 m on aurait pu espérer une nette amélioration de la situation pour tous les usager.ère.s.
Seulement voilà, la mairie a décidé de sacrifier la continuité cyclable au profit du stationnement sur voirie! Dans le sens montant, la piste cyclable protégée se verra rétrogradée en bande cyclable, à la merci des coups de volants et du stationnement sauvage. Si la bande cyclable prévue dans le sens montant sera rallongée jusqu’à la gare, il n’est pas prévu de la prolonger à l’est jusqu’au bout de la rue, on réitère donc l’erreur de la piste discontinue actuelle. La mise en continuité de cette bande et la mise aux normes d’accessibilité des derniers 80m de la rue (entre la rue Jeanneney et la rue du Chasnot) sont reportées au calendes Grecques. Dans le sens descendant, aucune bande cyclable n’est prévue, le stationnement sur voirie ayant préempté l’espace.
L’argument de la nécessité absolue de créer du stationnement « pour les riverains » avancé par la mairie, est presque risible. La rue Grosjean, qui lui est parallèle, est un véritable parking à ciel ouvert. D’ailleurs la rue de la Viotte compte assez peu de riverains, puisqu’il n’y a pas d’immeubles côté Nord et que certains bâtiments côté sud n’ont pas d’habitants (radio Bip, hotel Florel). En réalité, la densification du quartier s’est surtout le fait des récents immeubles « balcons des Chaprais », rue de Garibaldi et rue du Balcon, et pour lesquelles le stationnement des véhicules est assuré en dehors de la voie publique (1 place de stationnement par tranche complète de 45 m² de surface de plancher sont prévues, a minima, pour les logements neufs sur leur propre parcelle cadastrale). Il suffit d’une promenade dans le quartier pour constater que l’espace dédié au stationnement privé est important et largement sous-utilisé. Pire, l’argument nous a été avancé que « les gens » avaient besoin de privatiser l’espace public avec leurs voitures parce qu’ils auraient « depuis longtemps transformé leur garage en garde-meubles ». On croit rêver!
En conclusion, Besançon a encore beaucoup de mal à donner une position centrale au vélo dans ses projets d’urbanisme et continue à ne voir la ville qu’à travers le pare-brise d’une voiture. Qu’à cela ne tienne : la révolution cyclable, nous la ferons nous-même, en dépit du manque d’ambition de nos élu.e.s, et trop lentement sans doute pour se prémunir d’un changement climatique catastrophique, mais nous la ferons tout même! En attendant, au Pôle Viotte, allez-y à vélo!