Voici encore un article paru dans l’Est Républicain avant les vacances. Mais peu importe : nous ne sommes pas un organe de presse et rien ne nous oblige à parler de l’actualité au moment où elle est brûlante. Au contraire, laisser le temps de la réflexion est parfois salutaire.
Venons-en aux faits. Toufik de Planoise, bloggueur bisontin désormais connu, a un beau jour la surprise de recevoir une amende dont la valeur est plutôt salée compte-tenu de son budget d’étudiant.
Son crime ? Avoir collé un certain nombre d’affichettes de façon un peu sauvage et légèrement disgracieuse à travers les rues de notre belle ville.
Alors que l’information se répand sur les réseaux sociaux, nous publions la remarque suivante :
Pourquoi avons-nous publié cette remarque ?
Tout simplement, parce qu’une fois par an nous organisons une manifestation pour rappeler à nos élus qu’à Besançon, les cyclistes et surtout ceux qui voudraient le devenir, ont besoin d’une meilleure prise en compte que celle qui existe actuellement.
Et comme une manifestation, c’est mieux à 200 qu’à 20, nous collons des affiches pour que les gens sachent que ce jour là ils ont mieux à faire que de rester devant la télé.
Jusqu’à ces dernières années, la quasi-totalité des affiches était collée par un seul militant, très actif, de nuit, car il travaillait toute la journée. Une autre bénévole s’occupait quant à elle d’aller voir les commerçants pour en mettre sur les vitrines.
Nous remercions ce militant qui faisait ainsi don de ses précieuses heures de sommeil à l’association.
Lorsqu’est venu le temps de passer le flambeau, de nouveaux adhérents sont allés coller avec lui, afin d’apprendre à le faire : comment préparer la colle, comment transporter tout ce matériel sur un vélo, et surtout où coller quoi ?
Ces nouveaux adhérents constatèrent avec surprise que la réponse à la dernière question comportait plus d’emplacements sauvages que d’emplacement officiels, et s’en étonnèrent auprès du colleur historique qui répondit clairement.
« C’est simple. Les emplacements officiels, on ne les voit pas. Si on veut que les affiches soient visibles, il faut les mettre où les gens les voient. »
Après quelques soirées passées à coller dans toute la ville, les nouveaux colleurs durent se rendre à l’évidence : non seulement leur prédécesseur avait raison sur la faible visibilité des emplacements, mais en plus tout le monde pratiquait largement le collage d’affiches sauvage, notamment sur les coffrets EDF, les commerces fermés, le mobilier de chantier…
Des partis politique (ceux au pouvoir comme ceux de l’opposition) en passant par les organisateurs de concerts (des plus petits bars à Micropolis, et, plus tard, la salle de la Rodia) jusqu’aux manifestations les plus diverses (vide-greniers, loto…)… Sans oublier, bien sûr, les discothèques, grandes spécialistes du genre.
Bref. La question n’était donc plus de faire ou non du collage sauvage mais d’où en faire. Et surtout, d’où ne pas en faire.
Il a été décidé d’adopter quelques règles (voir fin de l’article), relevant du bon sens, du civisme, et du respect du patrimoine.
Malgré ces règles, nos colleurs arrivent à pratiquer un affichage très visible qui nous permet d’attirer du monde à notre manifestation, mais qui nous a aussi déjà valu quelques critiques de la part de personnes trouvant notre collage encore trop sauvage.
Voilà pourquoi, lorsque cette affaire a éclaté, nous nous sommes sentis concernés.
Notre association n’est pas là pour soutenir Toufik, pas plus que pour le critiquer. Être d’accord ou non avec ses opinions relève de la liberté de choix de chaque membre de l’association mais n’a pas grand rapport avec sa mission et ses statuts…
En revanche, cette affaire est l’occasion de rappeler que, s’il existe suffisamment d’emplacements réservés à l’affichage non commercial pour répondre à l’obligation légale, cela ne signifie pas qu’il en existe assez pour répondre aux besoins de l’important milieu associatif bisontin. Surtout lorsqu’ils sont mal placés.
Or, en lisant l’article, nous pouvons y découvrir que si notre remarque y est citée par un journaliste dont nous n’attendions pas moins, la ville n’y répond qu’à moitié et une indiscrétion permet d’apprendre que nous serions pas passés loin du dépôt de plainte nous aussi…
Nous nous posons donc les questions suivantes :
– Est-ce que laisser planer la menace d’une plainte pour affichage sauvage est une réponse adaptée au manque d’emplacements légaux ?
– Devons-nous, nous aussi, laisser planer la menace d’une plainte lorsque la ville crée ou rénove illégalement des voiries sans prendre en compte les cyclistes (giratoire Mallarmé, avenue Edgar Faure…) ?
Les questions sont posées.
PS : Pour terminer, voici comme promis les consignes qui ont été données à nos colleurs.
– Au centre-ville, aucun collage sauvage sur une zone qui ne soit pas déjà souillée. Pourquoi ? Parce que si c’est déjà souillé, le mal est déjà fait. Par ailleurs, si tout le monde applique ce principe, le collage sauvage ne s’étendra pas et pourra même disparaître au fur et à mesure des nettoyages.
– Pas de collage sur les panneaux de signalisation. En tout cas, pas sur la face réfléchissante où se trouve la signalisation. Si l’autre côté offre une surface visible des cyclistes et qu’elle est déjà souillée, on y va.
– On profite de toutes les surfaces jetables : une palissade de chantier, c’est éphémère par définition. Pareil pour les grands panneaux d’explications du chantier du tram (mais sans recouvrir les explications, évidemment !). Mais s’il y a eu un travail artistique de fait sur une palissade (décoration de celle devant la mairie, travail de Bien Urbain devant l’église de la Madeleine), alors on évite.
– OK pour les surfaces telles que les poteaux d’éclairage, coffrets électriques… si et seulement si ils sont déjà moches et souillés. Le moche est subjectif. Disons qu’on n’a jamais collé sur quelque chose qui soit encore en bon état et que nous risquions de dégrader. C’est toujours pareil : si tout le monde applique ce principe, les dégradations ne se répandront pas.
– Nous respectons aussi les affiches de concerts : on évite de recouvrir lorsque ce n’est pas encore passé, ou on ne recouvre que l’image en gardant l’info lisible.
– Nous respectons le patrimoine ancien : pas de collage sur un monument historique ou sur un bâtiment ancien quel qu’il soit, même si des gens irrespectueux l’ont déjà souillé ou taggué. Les collages sur les gouttières du centre-ville ont aussi été abandonnés (même si celles-ci sont souvent souillées).
– Respecter le patrimoine, c’est aussi respecter ce qui est neuf. Lorsqu’un endroit où on collait habituellement a été repeint ou rénové, on ne colle plus dessus. Et on ne colle pas sur ce qui vient d’être construit. Nous avons eu, par exemple, bien du mal de trouver un endroit pour coller qui soit visible dans les alentours de la Cité des Arts après que celle-ci ait été inaugurée…
– Autre règle de civisme : lorsque, comme le font tous les colleurs, nous enlevons une épaisseur d’affiches devenu trop importante sur une surface, nous ne la laissons pas au sol. Nous la ramassons pour la jeter proprement. Pourtant nous sommes à vélo ! La plupart des colleurs sont en voiture et laissent pourtant beaucoup de déchets par terre…
– Pour terminer, il va de soi que lorsqu’une surface légale et visible existe, nous l’utilisons et n’allons pas coller à côté.
PS 2 : Le long de la véloroute, la ville a elle-même collé ces affiches sur des poteaux électriques en bois. Poteaux bien visibles des cyclistes, sur lesquels nous n’avons pourtant pas collé car ils sont en bon état et non souillés.
Faites ce que je dis mais pas ce que je fais ?